Cinémas – Ruben ÖSTLUND : Snow therapy (2014)

snow therapy

Une famille suédoise, Ebba et Tomas, les parents et leurs deux enfants, Harry et Vera, est en vacances dans les Alpes françaises. Un jour qu’ils sont attablés dans un restaurant qui domine les pistes de ski, ils sont pris dans une avalanche, et le comportement des uns et des autres face à la situation va jouer un rôle de catalyseur jusqu’à remettre en cause l’équilibre du quatuor. Un incident dramatique qui va finir par tout faire exploser.

Car va s’ensuivre une crise en huis-clos (mis à part quatre personnages tiers, un couple d’amis, une amie d’Ebba et un homme de ménage, le casting est réduit à sa plus simple expression) savamment décortiquée par le cinéaste, qui va fouailler ce couple dans ces entrailles les plus secrètes pour en extirper tout.

Le cinéaste, suédois, est un compatriote d’Ingmar Bergman et nous le ressentons, à sa manière de faire naître une confrontation sans merci entre deux êtres. Il nous fait ressentir les petites distances glacées qui s’installent entre eux dès le début du film, à la manière dont l’épouse dit à son amie qu’il s’agit d’un voyage pour se retrouver entre eux, dans sa façon de les filmer comme une famille, sans rien montrer d’un éventuel désir entre l’homme et la femme. Beaucoup de choses passent subtilement dans la position physique de ces quatre être les uns par rapport aux autres, les regards entre eux, les silences presque autant que les paroles (sauf quand, à un moment clé, Ebba redit le récit de l’avalanche, comme une chanson de geste intime, seul moment d’emphase dans ce film si minimaliste). C’est d’ailleurs cette femme à l’apparence si douce et finalement tranchante comme de l’acier qui est au coeur de l’histoire, celle qui déclenche tout, qui décide que cela ne peut pas continuer ainsi. Une héroïne pure et dure comme un viking, inflexible presque jusqu’au bout, dans une tragédie banale qui semble ne pas vouloir dire son nom.

Le titre est ici riche de sens. « Snow therapy » ou comment un couple qui s’est égaré dans la quotidienneté de la relation remet en question ce qu’il est.

Pour enserrer comme un écrin ce récit, l’auteur travaille les images et les sons d’une manière très sophistiquée. Rien de doux dans la mise en scène, opacité des matériaux (bois, acier), lignes droites high tech de l’hôtel, impassibilité de la montagne et de la nature, autant d’arrière-plans denses et presque menaçants. J’avoue avoir pensé à « Shining », à certains moments (1), non seulement pour le cadre (hôtel à la montagne) mais aussi pour l’aspect angoissant des décors.

C’est une oeuvre d’une grande cohérence, mise en scène, décors, histoire, personnages, portée par deux excellents acteurs, Johannes Bah Kuhnke et Lisa Loven Kongsli.

A voir.

FB

(1) Film de Stanley Kubrick (1980)