Les films de Bollywood ont ceci en commun qu’ils prennent leur temps. Deux heures cinquante pour celui-ci et ce sont des durées que je ne sens pas passer tellement je suis emportée dans un autre monde avec une autre temporalité. Je dois dire que j’adore ces films, à la fois simples dans leurs propos (bien qu’intégrant pas mal de spiritualité) et très élaborés, et bien sûr codifiés selon des normes qui nous sont a priori étrangères.
Vous pourrez objecter que tout se ressemble dans les films Bollywood et vous auriez certainement raison dans un certain sens. Vous pourrez également dire que ce sont des films à l’eau de rose, tiens mettons M6, il va nous en tomber des dizaines de téléfilms romantiques… Faux ! Certes, les histoires d’amour sont schématiques, mais nous ne parlons pas de cela ici. Il manquerait à M6 l’ampleur de ce que peut produire Bollywood, 200 films par an environ (le plus important volume mondial) en forme de superproductions avec Miss Monde et acteurs célébrissimes à l’affiche (1). Les films sont là-bas bien plus qu’un divertissement, ils font partie de la culture populaire, ce qui explique par exemple les valeurs qu’ils véhiculent au travers des destinées qu’ils mettent en scène et que nous sentons présentes dans les dialogues, parfois en forme d’aphorismes.
Ici, nous suivons les avatars (2) de Sultan, devenu lutteur pour les beaux yeux d’une magnifique lutteuse, jusqu’à être un vrai champion. Et puis, et puis, tout ne va pas être facile pour lui, dégringolade, mais suivie d’une renaissance gagnée à la force des poings.
Ce que j’aime particulièrement dans ces films, c’est leur force narrative. Prenant leur temps pour déployer toute la voilure d’un mélodrame de belle facture, ils nous entraînent dans un récit au long cours, le plus souvent fascinant. Prenant souvent la forme d’un « success movie » où le héros va franchir maints obstacles pour se retrouver, ils rejoignent leurs cousins américains sur le même thème. Ce que j’apprécie également sont les chants et les danses qui ponctuent le récit ; quelle gestuelle élégante, quel plaisir des yeux toutes ces couleurs qui chatoient dans ces clips insérés dans l’histoire ! J’adore… Sûrement dans un émerveillement de petite fille, finalement affranchie des films tristes et sérieux (3), parfois en noir et blanc, je retrouve une âme d’enfant pour me régaler de ces chorégraphies lumineuses et optimistes. Et j’avoue que les presque trois heures de la performance passent comme en un clin d’oeil.
Ajoutons que nous sommes ici dans un film de la tendance moderne, puisant son inspiration également dans la filmographie actuelle. Car il s’agit ni plus ni moins d’une version hindi de « Rocky » ( 4) ou comment un lutteur/boxeur triomphe de l’adversité, voire de lui-même.
Bref, n’en déplaise à l’intelligentsia culturelle, j’adore ce genre de films qui sont souvent réussis, comme celui-ci l’est.
J’ai passé un très bon moment.
FB
(1) Saviez-vous que ce sont les Frères Lumière qui ont exporté en Inde le cinéma en 1896 ?
(2) Ah, ah bien contente d’avoir placé dans la critique d’un film indien ce mot, qui signifie à la base « incarnation de Vishnou » dans la religion hindouiste (et par dérivé les accidents, mésaventures qui arrivent dans la vie ou plus récemment les personnages choisis par les joueurs de jeux de rôle).
(3) Non, ne vous en faites pas, je reviendrai à ma nature première pour chroniquer les derniers opus art et essai, je vous promet ! C’est juste une déviation libératoire.
(4) Série de films entamée en 1976 et mettant en scène Sylvester Stallone, boxeur successful.