Chine- Ancienne ville de Zhengding (2024)

Shijiazhuang 石家庄 (« Village de la famille Shi ») est la capitale de la province du Hebei 河北 (« province au nord du Fleuve (Jaune) », avec les trains rapides, elle n’est séparée de Pékin que par une heure de trajet.

Un gaotie 高铁, de ces trains qui sillonnent désormais la Chine à plus de 300 km/h

J’ai décidé d’aller y faire un tour pour voir un très célèbre temple, la météo nous promettant de surcroît un temps magnifique. A peine arrivée, j’ai été frappée par la vision de cette ville hérissée de buildings modernes (je me demande si elle a un centre ?).

Une première impression derrière les vitres de la gare

Ce n’est plus un village depuis longtemps, plutôt une agglomération dite « moyenne », 11 millions d’habitants, considérée comme une ville depuis 1939, donc très récente. Je la connaissais au travers d’un film chinois dur et magnifique que je chroniquerai un de ces jours (mais depuis la France) « An elephant sitting still » (Hu Bo, 2018), qui n’en donnait pas un image très engageante.

J’ai pris cette photo sur internet, elle rend bien compte de ce que j’ai vu et que je n’ai pas pu photographier à travers les vitres du taxi

J’avoue m’être demandée, alors que je faisais mon chemin vers la vieille ville de Zhengding, si je ne m’étais pas trompée de destination, tellement il paraissait improbable que cette ville ultra-moderne abrite un temple ancestral.

Avec, comme dans toutes les villes chinoises, ces immeubles inachevés, crise immobilière oblige ornés de leurs capuchons bleus, ils semblent attendre une sorte de magicien qui viendra – peut-être ?

C’était une ville fortifiée bâtie au VIe siècle, qui garde son plan d’origine, avec des maisons basses et des rues très agréables, en contraste avec tous ces buildings qui la surplombent. Les murailles s’étendent sur 24 kilomètres et ont été refaites très récemment ainsi que les portes.

Avec un air flambant neuf assez déconcertant pour nous

La porte Changle 长乐, au sud de la ville, donne une idée de cette splendeur passée, ici avec un dragon du plus bel effet, pour fêter la nouvelle année

Il faut persister, les hiatus d’architecture sont ici monnaie courante et l’entrée du Temple Longxing 隆兴寺 (qu’on pourrait traduire par « Temple de l’immense prospérité »), ressemblait plus à ce que je venais voir.

Une entrée classique, je suis rassurée !

Il fait partie des plus célèbres temples bouddhistes en Chine, érigé en 586 et agrandi par des campagnes successives jusqu’au XVIIIe siècle, il occupe désormais 90 hectares et comprend encore de magnifiques bâtiments, statues et fresques.

Le Hall Manichéen, bâti au milieu du XIe siècle, est un des premiers exemples de ces splendeurs, c’est l’un des bâtiments de l’époque Song (Xe/XIIIe siècle) les mieux conservés de toute la Chine.

Un édifice singulier à double élévation, festonné de rouge par les arbres votifs

Il abrite des fresques de l’époque Ming, qui ornent l’ensemble des murs intérieurs.

Un exemple de ces beautés anciennes entrevues dans la pénombre

Et le chef d’oeuvre occupe un mur de 9 mètres sur 7 mètres, avec des couleurs d’une fraîcheur incroyable.

Le Paradis de l’Ouest, représentant les trois saints de l’ouest, Amitabha, Avalokitesvara et Mahasthamaprapta

Une dernière image pour vous montrer la somptuosité des nuances colorées et la légèreté des mouvements, les personnages, Bouddha et son entourage, semblent presque vivants.

Heureusement, il n’est venu à l’idée de personne d’opérer une restauration « à neuf »

Sur le mur nord, un immense panneau de bois sculpté et peint (lui aussi de 9 mètres sur 7 mètres) nous montre la déesse Guanyin (dans sa forme masculine ; Guanyin, déesse de la compassion était à l’origine Avalokitesvara, un Boddhisatva lui aussi associé à la compassion, il s’est féminisé dans la théologie chinoise).

Dans la position lalitasana, il/elle est dans une position assise de délassement, avec pourtant un je ne sais quoi de royal

Le bâtiment impressionne par sa hauteur, inédite, et ses incroyables charpentes, dégageant une odeur de bois bien agréable.

Faite de « doudongs », ces supports de bois imbriqués, typiques de l’architecture chinoise, qui donnent au bâtiment une presque allure de cathédrale

Les arbres anciens jalonnent mon chemin, honorés de bien des rubans rouges, qui font une belle parure à leurs branches noueuses, tordues par le temps.

Devant le Hall de l’autel bouddhique
Et le vétéran, un Sophora du Japon à l’âge respectable de 1300 ans…

Mais la concurrence est rude avec toute cette nature qui vibre dans le printemps, avec des éclosions de fleurs qui ne savent plus où donner de la tête.

Adage chinois : là où il y a des fleurs, il y a des jeunes filles en habits anciens, prêtes pour la photo !

Dans le Hall de l’autel bouddhique déjà mentionné, se trouve une statue de bouddha au double visage, en bronze, datant de 1493.

Avec le gardien qui prend soin des lys
Là nous voyons bien cette statue incroyable de finesse, dans son ensemble

Les différents pavillons que je vais découvrir par la suite, sous leur apparence classique, renferment des trésors.

Une bibliothèque tournante, destinée à abriter les « sutras » (livres sacrés bouddhistes), datant du VIe siècle

Dans le pavillon suivant, dit de Maitreya (le bouddha du futur), se trouve cette statue en bois de 7 mètres de haut, édifiée sous la dynastie des Song du nord (960-1127), je suis saisie par sa formidable grandeur, que dire de plus, je suis restée longtemps à la contempler et je suis revenue la voir à la fin de ma visite.

A la fois menaçante et apaisante, un tour de force assez impressionnant

Le Pavillon de la grande miséricorde abrite la pièce maîtresse du temple, une statue de bronze de 21 mètres de haut, datant de 971 et figurant la déesse Guanyin. Il faut tordre le cou vers le haut pour la voir en entier, tellement elle en impose par la taille.

Ses vingt paires de bras lui permettent de venir en aide au plus grand nombre, comme déesse de la miséricorde

Vous comprendrez mon enthousiasme, visiter ce magnifique temple, à la découverte de trésors, dans la belle lumière du printemps qui arrive, et être dans un des endroits les plus emblématiques du bouddhisme en Chine, c’est une vraie chance !

Dans le jardin attenant au temple, ouvert en 2005, les arbres plus jeunes crôulent sous les fleurs dans l’effervescence printanière.

Les magnolias en fleurs, sous bonne garde
D’anciennes statues du Xe siècle semblent écouter le maître à l’ombre des arbres
Et je ne résiste pas, spéciale dédicace à Juliette Gréco 🙂

Les pagodes

Le lendemain, j’ai arpenté les rues à la recherche d’autres temples (perdus ? Non cela fait trop « Indiana Jones » !) qui jalonnent la ville. Ils ont tous un point commun, l’intérêt n’est pas tant dans les temples eux mêmes (quand ils existent encore) mais dans les pagodes qui les ornent, quatre au total, toutes datant de la deuxième moitié de la dynastie Tang (618-907), remaniées ensuite tout en gardant leur structure originelle.

Bien que construites à la même époque, elles sont toutes dissemblables et vous font changer d’horizon à chaque fois, au gré de leurs styles différents.

La pagode en bois du Temple Tianning 天宁
La pagode en briques du Temple Kaiyuan 开元
La stupa du Temple Linji 临济, dite « stupa verte » ou stupa chengling 澄灵
La pagode « Fleur » du Temple Guanghui 广惠, aux allures bien exotiques

Un vrai dépaysement aux portes de Pékin !

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