Pékin – Badachu (2024)

Badachu (prononcez « badatchou »), 八大处 en chinois, un nom évocateur en français et pourtant bien loin de la signification réelle, qui est « les huit grands lieux ». Dans l’ouest de Pékin, là où commencent ces incroyables montagnes arides, se trouvent de très beaux parcs, dont celui-ci, que je n’avais jamais vu (ne me demandez pas pourquoi, c’est pourtant un endroit réputé). Je suis allée le visiter, entre hiver et printemps.

L’entrée, l’eau est encore prise dans la glace
Malgré l’immense ciel bleu, l’arrivée du printemps, pourtant proche, se fait attendre

C’est un ensemble de temples et de couvents, étagés le long de la montagne (j’ai monté 8 kilomètres et 85 escaliers de dénivelé, un bon exercice de cardio – pour ceux qui le souhaitent, un téléphérique peut les transporter en haut du site et ils n’auront plus qu’à redescendre). Quand je parle de la montagne, je devrais être plus précise, il y a trois montagnes ici, celle de la Princesse Cuiwei, celle de la tête de tigre et celle du dragon vert.

J’ai donc pris mon courage à deux mains (ou à deux pieds ?), pour gravir cet endroit, qui mêle touristes et fidèles, à la découverte de ces huit temples (sept, en fait, car le premier n’est pas ouvert au public pour le moment). Dans la tiédeur du printemps qui arrive, tout m’a paru splendide.

L’endroit est connu également pour ses arbres ancestraux qui ponctuent la promenade de leurs ramures tordues par les ans.

Un arbre à voeux

Le premier lieu est le Temple Lingguang, Temple de la lumière divine, érigé sous la dynastie des Tang (618-907), où vous êtes accueillis par cette formidable pagode de 30 mètres de haut, construite au XIe siècle pour abriter une relique particulièrement précieuse, une dent de Bouddha venue d’Inde.

La cour, joyeuse et animée, accueille fidèles et autres visiteurs
Partout des animaux gardiens, ici une chèvre qui se serait un peu déguisée en dragon
Flotte ici comme un air de Tibet, les tissus soyeux qui décorent la pierre, le drapeau multicolore, un je ne sais quoi qui vient d’ailleurs
Et un lion aux immenses griffes d’or, on hésite entre respect et peur

On peut gravir quelques volées de marches (qui ne seront ici ni les premières, ni les dernières) pour accéder à une plate-forme ornée d’un mur de pierre entièrement gravé, où les fidèles font leurs dévotions.

Avec ces bougies en forme de lotus si caractéristiques et les drapeaux revêtus des couleurs du bouddhisme tibétain en surplomb

Nous commençons ici à voir la ville, comme perdue dans le lointain.

Juste à côté de la pagode, un bassin orné de balustrades de pierre, abrite des poissons rouges.

Sous les arbres encore bien poussiéreux, cette statue presque irréelle

L’hiver est présent, nous sommes à une période charnière, les fleurs commencent à s’ouvrir mais la glace résiste aux coups de boutoir du printemps.

Je me demande comment les poissons survivent ?

Comme évoqué plus haut, l’endroit est connu pour ses arbres anciens (on les trouve bien souvent dans les monuments de Pékin, ils ont été laissés indemnes par la Révolution Culturelle), courbés par le temps, étayés par l’Homme, ils ont une grandeur ancienne très impressionnante.

Un pin ancestral déformé par le temps

En cheminant vers le deuxième des huit grands lieux, j’ai croisé cet endroit aux murs entièrement gravés en bas reliefs.

La porte d’entrée principale
Et la deuxième porte, plus loin

C’est un moment magnifique, de faire ce chemin, à la rencontre de tous ces lieux inspirants, entourée de fidèles parfois venus en famille (je l’ai déjà dit, les Chinois n’ont pas peur d’entraîner leurs chers et tendres dans des marches qui peuvent parfois tourner à l’épopée).

Le deuxième grand lieu est le Couvent Sanshan (des Trois Montagnes), monastère de nonnes bâti sous la dynastie des Jin (1115-1234) et remanié au XVIIIe siècle. Je ne pourrai malheureusement pas vous montrer la dalle de marbre gravée qui fait sa réputation, car la paroi de verre qui l’abritait empêchait toute photographie.

Dévotion dans le temple de l’entrée
Magnifique pavement de pierre qui invite à entrer malgré la neige persistante
La cour centrale avec sa cloche de bronze
Et ce bouddha orné de mille lumières

En continuant mon chemin, j’arrive au troisième lieu, le Temple Dabei, le Temple de la Grande Miséricorde, construit en 1033 et remanié ensuite.

Gardé par un dragon de pierre, sur fond de pierre
Et plus loin un dragon sur fond de montagne

Ce lieu est célèbre pour ces deux gingko, qui contemplent les visiteurs du haut de leurs six siècles, pendant lesquels ils sont devenus comme de petites forêts à eux seuls.

La beauté de ce temple se niche également dans les plafonds des salles de dévotion, où des dragons finement ciselés règnent en maître dans toute leur dorure.

On aurait presque peur devant cette créature formidable
Car il n’est pas seul, appuyé par une armée qui ne demande qu’à s’échapper de ses caissons de bois
Un autre de ces magnifiques plafonds

Et enfin, autre point d’intérêt du lieu, les sculptures d’arhats (fidèles bouddhistes ayant atteint le nirvana), en bois de santal, réalisées par un grand artiste, Liu Yuan, sous la dynastie Yuan (1271-1368).

Magnifiques

Continuant ma route sinueuse au coeur du temple, je suis tombée en arrêt devant cette si belle statue de Guanyin, déesse chinoise de la miséricorde, enserrée dans toute la glace de cet hiver qui n’en finit pas de se disloquer.

J’ai continué mon ascension vers les temples supérieurs, croisant en chemin quelques figures remarquables.

Conversation religieuse (?) autour d’un portable

Le quatrième lieu, le Couvent (de femmes) Longquan, Couvent de la source du dragon, est connu pour sa source qui ne tarit jamais (ce qui est un exploit dans cet environnement si sec).

La source se trouve au creux de cette arche

Devant l’édifice, encore un arbre remarquable, noueux et pourtant lançant encore vers le ciel ses ramures qui se couvriront bientôt d’un feuillage de printemps.

Le cinquième lieu (j’espère que vous suivez !) est le Temple de Xiangjie, Temple du Monde de l’Encens, très grand et étagé sur la montagne. A part ses dimensions (c’est l’un des plus grands), il ne présente pas d’intérêt particulier et je suis passée assez vite, d’autant plus que le temps commençait à me manquer !

Avec des grottes abritant les signes du zodiaque

Je suis enfin arrivée au plus haut de ces lieux, le sixième, la Grotte Baozhu, la Grotte des Perles Précieuses, dont l’intérêt principal est d’offrir une vue incroyable sur la ville en contrebas.

Avec quand même un petit halo de pollution

Je suis ensuite redescendue en empruntant le téléphérique, afin de continuer à contempler la cité à l’horizon (notez que vous pouvez également emprunter un tobbogan d’acier qui serpente sous le tracé du téléphérique, frissons de peur et de plaisir assurés !)

Mais alors, me diront nos amis matheux, nous ne comptons que six lieux, s’il y a huit lieux à voir et que l’un d’entre eux est fermé, il en reste sept, non ?

Bien vu ! Mais il faut redescendre et emprunter un autre chemin qui monte pour aller voir le Temple Zheng Guo, Temple de la Bouddhéité (c’est la traduction que j’ai trouvée mais je ne suis pas complètement convaincue).

L’entrée, à peine devinée derrière la frondaison des arbres de l’hiver

Ce qui est très beau ici, et très paisible, comme tout le site d’ailleurs, est la succession de petites cours arborées par des arbres bien anciens.

D’adorables petites maisons dont on ferait bien son chez soi en haut de la montagne

Et puis, pour finir, cette grotte un peu mystérieuse, telle que j’en ai vues au Tibet ou à Shangri-La, humble et bien retirée tout au bout du temple.

Rouge et jaune, les couleurs du bouddhisme tibétain

C’était une promenade merveilleuse, à la beauté insoupçonnée (comme disent les Chinois 没想到这么漂亮 – mei xiang dao zheme hao, je ne me serais pas doutée que ce serait si beau).

FB