Un bonbon sucré et doux, de ceux que l’on laisse fondre sous la langue en le savourant jusqu’à la fin, voici ce que je dirais au premier abord du dernier opus de ce si prolifique « Maître » New-Yorkais (plus de 90 films à son actif !). C’est une gourmandise qui vous laisse le coeur léger et des étoiles dans les yeux, un de ces films que l’on reverra avec plaisir un de ces jours ternes où rien ne va bien.
Soit Stanley Crawford, magicien de profession sous le pseudonyme de Wei Ling Soo, décrit comme l’un des plus grands mages des Années Trente, également spécialisé dans le démasquage de faux médiums et autres envoûteurs. Persuadé par son ami Howard Burkan, il se rend auprès des Catledge, dans le sud de la France, où la jeune Sophie Baker, médium américaine, a mis la riche famille sous sa coupe. Le sarcastique et revenu de tout Stanley arrivera t-il à ses fins ?
Le cinéaste a mis tous les atouts de son côté pour nous donner ce spectacle ciselé comme un petit bijou.
Une intrigue légère flirtant avec des sujets sérieux, tout d’abord. La magie est au centre de l’histoire, sujet de prédilection de l’auteur depuis longtemps (« Alice » 1990, « Le sortilège du scorpion de jade » 2001, « Scoop » 2006, etc.), comme s’il comptait sur elle pour ré-enchanter le monde, ce qu’il fait pour nous dans ce film. Ici, elle est opposée à la rationalité comme filigrane de l’oeuvre, l’aspect délicieux étant que c’est un magicien qui traque un médium ! Rassurez-vous, le propos ne se prend pas au sérieux, même si, loin d’être creux, il avance quelques idées un peu étoffée sur le sujet. Nous assistons également à l’évolution du personnage principal, Stanley, porté par un Colin Firth au mieux de sa forme pour nous donner à voir les petites failles qui apparaissent au fur et à mesure ; mais, et c’est là notamment ce qui fait l’originalité de Woody Allen par rapport à un certain cinéma américain, il n’y aura pas de modification radicale du héros, juste quelques prises de conscience qui vont l’ouvrir vers autre chose.
Woody Allen choisit également une époque qu’il apprécie visiblement beaucoup, nous en sommes sûrs pour ses goûts musicaux, les années 1930 et en situant l’histoire sur la Côte d’Azur, il crée des images surannées pleines d’une beauté ancienne, sous la lumière douce de la Méditerranée. Nous le sentons dans son élément, au milieu de ces standards de jazz (« hot music » de l’époque), de ces robes ornées qui voilent et dévoilent le corps féminin dans toute leur souplesse d’étoffe et de ce merveilleux coin de France, cette Côte d’Azur des villas majestueuses aux jardins éclatants de couleur. Soulignés par sa manière si personnelle de mettre en lumière paysages et personnages, ces éléments prennent un relief particulier, comme gorgés de beauté. C’est d’ailleurs un film très anglais, dans la posture des personnages aussi bien que dans la description de la nature, tout y feutré et « cosy ».
Autre ingrédient du film, les dialogues. Quel humour, quelle finesse ! Nous rions très souvent à ces répliques pleines d’esprit très écrites sûrement mais qui ne le paraissent pas. Cet art particulier du metteur en scène pour les dialogues comiques – sans jamais tomber dans le vulgaire – est vraiment à souligner.
Ajoutons à cela des acteurs comme d’habitude très bien choisis. Colin Firth, tout en finesse dans ses différentes métamorphoses (quel grand acteur !) et la très très jolie Emma Stone, aux yeux de lumière pure, qui pose sa personnalité face au personnage principal. Les seconds rôles sont comme à l’accoutumée excellents.
Maintenant que l’hiver semble vraiment arrivé, courez voir cette chose pétillante et revigorante. J’ajouterai que je lancerai bien une pétition pour que ce type de films soient remboursés par la Sécurité sociale 😉 !
FB
Ping : Cinémas – Woody ALLEN : Café Society (2016) | Rue2Provence