Nous vivons en Chine depuis le début de l’année au rythme des tests PCR. Il est vrai que quand je suis rentrée l’an dernier en France, étant dans un « trou noir », puisque mes deux injections de vaccin chinois n’étaient pas reconnues et que je n’ai pas pu trouver un praticien compatissant qui me vaccinerait selon l’orthodoxie française, j’ai dû sacrifier à la routine de faire des tests PCR réguliers pour pouvoir accéder aux lieux publics (notons qu’en plus, ces tests étaient payants et non remboursés, puisque je n’avais plus accès à la sécurité sociale française, lost in translation…).
Mais cela atteint ici des proportions hors norme puisque des centaines de millions de citoyens de par le pays sont obligés de faire des tests PCR réguliers pour pouvoir se déplacer, aller au bureau, faire des courses ou accéder à des lieux culturels. Le rythme dépend des endroits, à Pékin nous sommes assez chanceux, depuis avril nous ne devons faire qu’un test tous les trois jours (j’en suis à peu près à 70), mais dans certaines villes, c’est un test par jour (à Shenzhen, par exemple mes collègues ont fait plus de 200 tests depuis le début de l’année).

Ce rituel fait partie de notre quotidien, repérer un stand ouvert, donner son nom et son numéro de passeport et ouvrir la bouche pendant qu’un(e) employé(e) (je ne suis pas sûre qu’il soit ici question de personnel médical) agite vaguement un coton tige dans votre cavité buccale.
Et donc je voulais remettre à leur juste place ces lieux si importants dans notre vie quotidienne.
The man to be : Dabai 大白
Qu’il fasse 30° ou plus, qu’il vente ou qu’il pleuve, il est imperturbable, vêtu de sa tenue blanche en non-tissé parcourue de bandes bleu ciel du plus bel effet. On l’a surnommé le « Grand blanc », ce qui est assez approprié je trouve. Il ajoute souvent à sa tenue des accessoires comme gants, visière, masque et sur-chaussures pour pouvoir contenir l’horrible pandémie qui nous menace.

Il circule parfois avec des accessoires de désinfection à base de javel. Car il est celui qui maintient l’équilibre sanitaire du pays, luttant contre cette pandémie venue de l’étranger qui se répand sournoisement dans le pays et s’en prend à des citoyens qui ne demandaient rien.
Quand il n’est pas en service, il mène une vie à peu près normale. Du moins nous l’espérons.

Il existe un personnel périphérique, que nous pourrions nommer « sous da bai », ils n’ont droit qu’à la tenue bleue, avec quand même visière, masque et gants, ce qui leur assure une place dans la hiérarchie sanitaire. Ils convoient les déchets de tests PCR, font la police dans les queues à l’entrée des stands de tests. Mais nous sentons bien qu’ils n’occupent pas la première place, il va leur falloir progresser et gagner des points pour accéder au saint des saints, la tenue blanche !
Ces brigades sanitaires de « grands blancs » sont aux côtés des forces de l’ordre pour emmener les gens en quarantaine centralisée, pour cadenasser des appartements, pour veiller que le virus ne s’échappe par aucun côté.
C’est l’homme important du moment (ou la femme, d’ailleurs, avec ces combinaisons intégrales, difficile de faire la différence parfois), celui/celle sur qui repose le respect de la politique dynamique Covid-19, dont nous avons compris, suite au Congrès d’octobre que c’était l’axe majeur du gouvernement, bien avant l’éducation, la politique internationale ou l’économie.
Mais comme c’est pour le bien du peuple…
The place to be : le stand de test PCR
Puisque nous sommes contraints de nous plier à ce rituel au moins tous les trois jours, j’ai considéré que ces endroits devenaient plus importants que les restaurants et autres lieux de sortie (qui de plus ont été fermés longtemps dans bien des villes, la faute à cette dangereuse pandémie). Effectivement, si j’ai fait plus de 70 tests PCR depuis avril, il n’y a aucun lieu d’intérêt (musée, temple, restaurant, banque, bibliothèque…) que je n’ai davantage fréquenté depuis cette date.
D’ailleurs, les applications de déplacement chinoises ont pris cela en compte depuis longtemps.
Vous pouvez ensuite choisir l’itinéraire optimal pour y aller, en taxi, en voiture particulière, à pied ou en vélo. Pour vous faciliter la tâche, l’application vous indique les vélos partagés que vous pouvez emprunter sur le chemin.

Estimant que ces lieux, si fréquentés, souffraient d’un manque de reconnaissance, j’ai décidé de faire un petit guide de ceux qui son proches de chez moi, pour évaluer leurs points forts et leurs points faibles et les noter, à l’instar des autres lieux publics d’intérêt.

Le plus pratique
Idéalement situé à une des entrées (ou sorties, tout dépend) principales de la station de métro Beixinqiao 北新桥, il vous permet de faire des tests jusqu’à 21 h 30, ou le matin si vous êtes en retard au travail (ouverture à 9 h).
Dans la série « DYI » (do it yourself), il arrive que l’accorte silhouette qui vous accueille pour vous enregistrer, renonçant à vous regarder ânonner votre nom, vous tende son téléphone pour que vous entriez vous-même vos coordonnées (rassurez-vous, le téléphone est manié avec des gants régulièrement désinfectés au gel hydro-alcoolique).
L’atmosphère est internationale, outre les locaux, vous pourrez croiser des Occidentaux qui vivent alentour, de belles rencontres en perspective dans la queue.

Accessibilité : ⭐⭐⭐⭐excellente, métro Beixinqiao, sortie B, garage à vélo à proximité, très bien placé pour l’arrivée en voiture (pour ceux qui viendraient de vraiment loin)
Niveau de sécurité : ⭐⭐⭐⭐fort, un dabai est posté à l’entrée de la queue pour voir si tout le monde porte un masque et scanne le health-kit à l’entrée de la queue
Lieux d’intérêt à proximité : ⭐⭐⭐⭐⭐le Temple des Lamas et beaucoup de restaurants de bon niveau
Cartes d’identité chinoises et passeports acceptés,
Animaux friendly, convient aux vegans et aux végétariens
Les plus : si vous faites un test le soir, votre compteur sera à zéro le lendemain.
Le plus authentique
Il faut s’enfoncer dans les hutongs, ces allées sinueuses où habitent les vrais locaux, pour trouver ce point de test.
A deux pas de la station de métro précédemment mentionnée, il reste très accessible aux vélos et aux piétons. En voiture, se méfier de l’étroitesse des voies et des voitures garées parfois en dépit du bon sens.
Son côté intime et chaleureux, avec ces beaux arbres qui le surplombent, en font un endroit de choix pour sacrifier au rituel périodique du test PCR.
Vous serez immergés dans le quotidien des habitants du coin, un moment de vraie rencontre avec le peuple chinois.
Accessibilité : ⭐⭐⭐ le métro est proche, à 10 mns à pied. En voiture, il peut être un peu compliqué de se garer, le vélo reste la solution optimale.
Niveau de sécurité : ⭐⭐moyen, une femme en tunique bleue vous demande de scanner le health-kit une fois sur deux
Lieux d’intérêt à proximité :⭐⭐⭐ les hutongs et les Chinois authentiques
Cartes d’identité chinoises et passeports acceptés, Animaux friendly, convient aux vegans et aux végétariens
Le plus artistique
Sa position médiane à égale distance des stations de métro Beixinqiao et Dongzhimen en font un lieu stratégique, accessible facilement en voiture, puisque situé à l’angle d’un carrefour très animé.
Ce qui fait sa particularité est la possibilité, en se faisant tester, d’accéder à des oeuvres d’art exceptionnelles, n’ayons pas peur des mots.
Vous aimerez cette atmosphère artistique si spéciale.
Accessibilité : ⭐⭐⭐⭐excellente en voiture, si vous êtes l’heureux propriétaire d’une grosse cylindrée (Maserati, Porsche ou autre), vous pourrez la garer en double file et regarder la population l’admirer. Egalement très accessible en vélo pour les moins fortunés ou les plus sportifs. A pied, compter 15 minutes depuis la station de métro Dongzhimen.
Niveau de sécurité : ⭐⭐⭐⭐⭐très fort, le dabai à l’entrée de la queue observe tout derrière ses lunettes de protection et ne laisse rien passer
Lieux d’intérêt à proximité : ⭐⭐⭐des magasins d’alcool et de cigarettes, pour vous remettre de vos émotions
Cartes d’identité chinoises et passeports acceptés,
Animaux friendly, convient aux vegans et aux végétariens
Les plus : vous pourrez peut-être voir de belles voitures en double-file ; un service presque non stop avec une courte césure entre 12 h 00 et 12 h 00 (voir horaires ci-dessus).
Le plus officiel
Là également, il faudra vous enfoncer dans l’authenticité des hutongs, croiser de vrais gens d’ici, pour arriver à ce très ancien hôpital (1885), l’Hôpital 6 de Pékin, service des urgences, qui offre des tests 24 h sur 24.
Vous découvrirez un bâtiment d’exception, qui, bien que remanié, reste un témoignage de l’ancien temps à Pékin. Vous aurez également la chance de penser que ceux qui vous font les tests sont de vrais professionnels (ce dont vous aviez fortement douté dans vos tests précédents), car vous êtes abrités par une vraie institution.
Accessibilité : ⭐⭐⭐convient aux deux-roues ou aux marcheurs. Il est déconseillé d’essayer d’atteindre le centre de test en voiture ; après, faites comme vous voulez, mais vous serez prévenus.
Le plus urbain
Proche du Collège Impérial, sur une avenue fréquentée et arborée, ce petit stand qui ne paye pas de mine est idéalement situé, proche de restaurants et commerces de tout genre.
Côté transports, à proximité se trouve une station de bus très bien desservie et les vélos partagés ne manquent pas.
Un endroit à découvrir, simple et pratique.
Niveau de sécurité : inexistant, personne pour vous demander de scanner votre pass sanitaire
Lieux d’intérêt à proximité :⭐⭐⭐ nombreux magasins de tout genre
Voilà, j’espère que mon article décalé vous aura plu.
FB
On se croirait en pleine science-fiction. Merci pour cet article sanitaire. 😉
Merci Marcorele, il est important de parler de cette situation que même Ubu n’aurait pas imaginée !
Merci du soutien, cela fait du bien.
J’ai bien rigolé en lisant ce poste, une excellente façon de mettre de l’humour sur un sujet si contraignant de notre quotidien!
Merci Angiepav ! Je sais que tu me comprends très bien !
C’est un véritable Michelin du PCR! Bravo pour cette étude sur des méthodes qui, vues d’ici, paraissent effrayantes.
La politique 0 Covid semble d’ailleurs affecter l’ensemble de la population du pays, certaines régions semblent plus sacrifiées que d’autres (très long confinement, problème d’alimentation, impact sur les espaces de production,…)
Et avec l’hiver qui arrive, cela ne risque pas de s’arranger…
Merci de ton commentaire. Et tu ne crois pas si bien dire, nous avons eu l’espoir que les choses changeraient après le congrès d’octobre, au contraire, tout empire… Maintenant, sortir de Pékin est une loterie, je ne sais combien de gens sont bloqués hors de la ville avec un « pop-up » sur leur pass sanitaire de Pékin. Sans pass sanitaire, impossible de prendre un billet d’avion ou de train pour Pékin. Pour certains cela fait plusieurs semaines (un des mes amis est bloqué à Shanghai depuis début octobre). Donc nous ne sortons plus de la ville et dans l’enceinte de celle-ci sont opérées de vraies rafles, on vient enfermer tout un immeuble car une personne qui l’habite a croisé dans un autre endroit un cas positif… Toutes les semaines, dans mon entreprise, 3 à 4 personnes sont bloquées chez elles entre 3 et 7 jours. Et encore, soyons positifs, à Pékin pas de confinement général jusqu’ici, ce qui a été le cas dans bien des villes dont on ne parle pas dans la presse européenne (une ville du centre de la Chine en est à son 9e confinement).
Bon, j’arrête, par cet article je voulais mettre un peu de légèreté dans tout cela.
Ici, on a beaucoup parlé des milliers de visiteurs coincés dans le Parc Disneyland de Shanghai, soumis à un test pour sortir.
C’est bien si on en parle en Europe car ici, ce genre de choses est au quotidien.