Voilà un film à la fois sobre et engagé, de mon point de vue. L’affiche est révélatrice de ce que nous allons voir : le héros (Vincent Lindon, qui, je vous le concède, fait une tête des plus sévères sur l’image – rassurez-vous, il ne fera pas preuve de beaucoup d’humour dans ce film ! 😉 ) est saisi en pleine action et en pleine netteté par rapport à un arrière-plan flou, dans lequel nous devinons un décor religieux (nous sommes au Vatican).
(Presque) tout le film est contenu ici, la confrontation entre le rationnel et le spirituel, le laïc et le sacré, avec une bienveillance très bien venue (et pas si simple à l’heure actuelle).
Jacques, reporter de guerre qui rentre de Syrie, où il a perdu un de ses partenaires (et amis), est contacté par un évêque pour se joindre à une commission d’enquête canonique sur des apparitions de la Vierge Marie dans un petit village du Sud-Est de la France. Une jeune fille, Anna, a assisté à deux reprises à des apparitions de la Vierge et les pèlerins commencent à affluer sur le site ainsi que la presse, commençant à créer du désordre et à être un peu trop en visibilité. Jacques va rejoindre le groupe d’enquête, rencontrer la jeune fille (formidable Galatea Bellugi) ainsi que son entourage, et mener son investigation.
Le sujet même du film est passionnant. Il nous plonge dans un monde dont on parle peu à l’heure actuelle. Car la religion catholique, dont notre société est issue est de mon point de vue l’objet de visions assez caricaturales ; je dirai même qu’il ne fait pas bon être Catholique et revendiquer sa Foi en France en ce moment. Car les opinions les plus souvent entendues sur ce point sont négatives, qu’il s’agisse des prêtes pédophiles, des opinions du Pape sur les moyens de contraception ou le mariage gay, ou encore des groupes extrémistes anti-avortement (1). Nous sommes également à vif sur les religions en général, avec tous les emportements actuels de la religion musulmane, qui dévaste le monde en ce moment. Bref, il est très périlleux d’ouvrir ce sujet…
Et pourtant, et pourtant… Xavier Giannoli le fait avec une neutralité et une finesse remarquables, se défaisant des préjugés qui agitent notre société. Notons que pour corser le récit, il l’amorce avec la vision dévastatrice de l’extrémisme musulman, qui a causé la mort du partenaire de Jacques. Pas de quoi a priori nous mettre en empathie avec l’histoire qu’il va nous conter à propos des possibles divagations d’une autre religion. Et néanmoins, il va garder cet équilibre, faisant la part des choses entre piétisme et religion, adoration de reliques et piété. Plus, il nous montre l’oscillation entre la raison et le sentiment tout au long du film.
Il peut réaliser cela en objectivant le sujet via l’enquête que va mener Jacques et qui lui permet de faire coïncider le monde religieux avec le monde rationnel, sans que l’un ne l’emporte sur l’autre. Et soyons honnêtes avec nous-mêmes, nous avons peut-être déserté la religion, mais nous avons créé bien d’autres mondes magiques : les philosophies orientales, les thérapies de tout poil, l’astrologie, les sectes, et j’en passe. Sans compter les centaines de films, jeux vidéo, livres, qui nous emmènent vers ces univers féeriques. Nous ne pouvons vivre sans merveilleux, c’est sûr.
Revenons à notre sujet 🙂 (bien que je ne sois pas sûre de l’avoir jamais quitté), c’est un magnifique film né du heurt entre enquête policière carrée et univers religieux, qui donne en plus à penser sur ce point.
Excellent
FB
(1) Pour ma part, je ne mélange pas tous ces points de vue. Si je suis totalement opposée, bien sûr, à la pédophilie, dans quelque milieu qu’elle aie lieu et aux mouvements extrémistes de tout bord, je serai plus nuancée sur l’opposition du Pape à la contraception et au mariage gay. D’après moi (opinion très personnelle que j’assume), la Bible, livre fondateur de cette religion, est un livre de filiation, où un peuple se construit de naissance en naissance (« Et Abraham enfanta Isaac… » etc, etc…). Le mariage est donc l’union sacrée d’un homme et d’une femme qui doivent se jurer fidélité et dont le but est de fonder une famille. Nous pouvons donc comprendre (certains ne me suivront pas, je le sais) que le Pape, en tant que Chef de cette Eglise, suive le dogme à la lettre et ne soit pas favorable à l’homosexualité ou à la contraception. En même temps il n’est pas obligatoire d’adhérer à ces conceptions ; mais pourquoi voudrions-nous que l’Eglise Catholique change pour être d’accord avec nous ? Il faut des pensées contradictoires et l’idée de rallier toutes les parties à notre idée dominante est à mon avis une erreur, qui nous conduit à la pensée unique… Ici j’aurai fait polémique et j’assume… Et si l’un d’entre vous m’oppose le SIDA en Afrique, où une partie de la population est Catholique et qu’il est donc criminel que le Pape soit contre le préservatif, je dirai que chacun peut choisir son camp…