Très belle affiche décalée, pour un film qui ne le sera pas moins…
Gaspard (Félix Moatti) rencontre dans un train Laura (Laëtitia Dosch, vue récemment dans « Jeune fille » de Léonor Serraille) qui vient de vivre une expérience assez cocasse, et voyant que cette fille peut s’adapter à toute situation, lui propose de l’accompagner au mariage de son père (Johan Heldenbergh). Celui-ci, la cinquantaine séduisante, doit convoler en noces avec Peggy (Marina Foïs) dans une semaine. Gaspard amène donc Laura dans un zoo, avec au centre une magnifique maison décatie, où vit sa famille presque à l’écart du monde.
Le cinéaste a soigné le contexte, pour le rendre très original, cette somptueuse bâtisse, entre château et gentilhommière, confortable et au bord de la ruine en même temps ; et tous ces animaux improbables qui s’ébattent dans la campagne limousine, okapis, singes exotiques, tigres, vautours, girafes, antilopes et autres… Tout cela nous décentre de notre contexte habituel et contribue de prime abord à l’aspect fantaisiste de l’ensemble.
Dans cet environnement très particulier se joue une histoire qui parle de la difficulté – de l’impossibilité parfois – de grandir et de devenir adulte (j’ai pensé aux films de Wes Anderson, notamment au superbe « Moonrise kingdom », 2012). C’est un monde merveilleux peuplé de personnages enfantins qui est décrit ici, en forme de paradis terrestre, où animaux et humains vivent en harmonie dans un univers clos, presque perméables les uns aux autres (la soeur Coline, – Christa Théret – qui se prend pour un ours, en est l’illustration la plus aboutie). Le film n’est que chaleur et lumière (il fait toujours beau comme dans les contes de fées heureux), aucune incursion dans la zone extérieure à l’exception du voyage de Laura et Gaspard au début et d’une tentative de fuite, qui fera long feu… La maison nourricière, foutraque et peuplée d’objets disparates, fait comme un cocon à la communauté, et tout se passe comme si elle leur pourvoyait les éléments nécessaires à leur vie quotidienne, vivre et couvert notamment. Car quelle que soit la génération, tous vivent au diapason, dans leur rêve.
Nous ne pouvons pas dire que ces imaginaires seront brisés ici, tout au plus subiront-ils de légères distorsions, qui amèneront leurs propriétaires à infléchir un peu leur vie pour regagner le monde des humains, tout en gardant au fond d’eux, nous l’espérons, quelque chose de cette vitalité heureuse de l’enfance.
Film original et chaleureux, porté par une belle distribution au diapason.
FB