Matthieu Amalric, plutôt comédien de son état, nous avait étonné en 2010 avec ce film particulier « Tournée » où en même temps que d’être réalisateur, il campait le personnage d’un manager d’une tournée de strip-teaseuses américaines en France. Film un peu foutraque, débordant de plein de choses, ode à la sensualité féminine ; j’avais beaucoup aimé.
Il réalise encore un film féminin, en forme de superposition de deux personnalités. D’un côté Barbara (1930-1997), cette chanteuse française vraiment à part, qui a envoûté plusieurs générations avec sa voix et son phrasé si particuliers et ses magnifiques textes emplis de poésie et de frémissements ; de l’autre Jeanne Balibar, ex-femme du réalisateur (loin de moi ici l’idée de faire une chronique du coeur, mais cela explique la grande complicité de ces deux-là, je pense), ressemblant à s’y méprendre parfois à la première, avec ses geste fiévreux et son beau filet de voix. Un film en fractale, une mise en abyme où la chanteuse répondrait à l’actrice.
L’argument peut être rapidement résumé : un cinéaste réalise un film sur Barbara. Et voilà, c’est tout mais c’est beaucoup. Un film sur un tournage, nous pensons bien sûr à « La nuit américaine » de François Truffaut (1973), bien qu’ici, la confusion entre tournage et scénario du film lui-même soit poussée bien plus loin.
Nous sommes dans un film d’hommage à ces deux femmes ; nous devinons tout l’amour et toute l’admiration que Matthieu Amalric éprouve pour les deux et le rôle qu’il se donne, celui du metteur en scène, est à l’unisson, un voyeur/admirateur tout au long du film ; à l’instar du manager de « Tournée » . Et nous en arrivons nous aussi à presque tomber amoureux des deux. Il faut dire que Jeanne Balibar est absolument magnifique ici.
La mise en scène est tout à la fois cérébrale et sensuelle, très pensée, presque trop… Car nous finissons par avoir l’impression de juste effleurer le sujet ; Barbara reste pour moi l’absente, abordée d’une manière tellement ténue qu’elle finit par ne rien révéler sur elle-même. Et c’est dommage.
Cela aurait pu être un grand film.
FB