
Les héros en pleine action
Voilà un film que j’avais complètement loupé, et grâce à une recherche pour écrire sur un autre film (extension infinie de la culture…), je suis tombée sur lui, pépite entre les pépites, pas loin de ce que j’appelle les films « déjantés », qui osent tout, jusqu’à une absurdité jouissive.
Petit insert ici : à cette catégorie purement made in USA, je raccroche en forme de palmarès intime,
- « Dodgeball » (Rawson Marshall Thurber, 2004), récit d’un affrontement entre deux salles de sport, l’une tenue par Vince Vaughn avec ce qui est présenté comme un ramassis de loosers et l’autre, par Ben Stiller, tendance et chic. S’ensuivra une compétition de dodgeball (comprenez ballon prisonnier) entre les deux équipes…
- « Les rois du patin » (Josh Gordon et Will Speck, 2007) où Will Ferrer et Jon Heder (que nous allons retrouver ici), patineurs disqualifiés dans la catégorie patinage solo, vont tenter de remporter les jeux olympiques en catégorie double…
- « Rien que pour vos cheveux » (Dennis Dugan, 2008) dans lequel Adam Sandler interprète le rôle d’un super-agent du Mossad, opposé à John Turturro, mais qui ne rêve que d’une chose, devenir coiffeur
- « Ricky Bobby roi du circuit » (Adam Mc Kay, 2007), où nous assistons à l’ascension de Will Ferrer, flanqué de John C. Reilly et de Sacha Baron (futur Borat) comme pilote de course automobile
J’arrêterai là mon podium, auquel j’aurais pu rattacher « Mary à tout prix » des Frères Farrely (1998) et plus largement, tous les opus de ces derniers.
Nous sommes ici dans une catégorie de films complètement à part, dont je ne sais pas d’où l’inspiration vient aux auteurs (multiples, il ne s’agit pas d’un phénomène isolé, plutôt d’une tendance et nous ne pouvons que nous en féliciter).
Ici, un film que j’attendais depuis longtemps, qui s’en prendrait aux films d’adolescents au collège aux Etats-Unis. J’aime bien certains d’entre eux (je suis restée fleur bleue) tout en reconnaissant qu’il s’agit d’un genre bien circonscrit, avec ses codes et ses passages obligés. Soit en général un collège d’une petite ville américaine, dominé par une reine de beauté, le plus souvent attrayante (si l’on aime les filles très arrangées), assez bête et plutôt malveillante ; une sorte de méchante fée (certains films osent d’ailleurs le parallèle avec la reine de Blanche-Neige, le miroir étant remplacé par facebook ou autre réseau social). Surgit face à elle un(e) asocial(e) (du moins selon les normes en vigueur dans le monde qui nous est présenté), qui partant de rien, va finir par exclure la reine, encore une success story où quelqu’un parti de rien arrive à tout (mais là nous ne lui en voudrons pas, devant tant de manichéisme, une fille un peu idiote, qui n’aime que le rose et sort avec le capitaine de l’équipe de rugby, son double masculin sourire ripoliné et abdos à l’avenant, versus une personne un peu intelligente dans tout ce marasme de bêtise).
Ici, le canevas est identique. Soit Napoléon Dynamite (si, si), ado roux frisé à lunettes, le plus souvent hébété comme s’il avait pris de la drogue, sans talent particulier, qui va se lier d’amitié avec Pedro, un Mexicain timide ; à eux deux, et presque à leur corps défendant, ils vont partir à l’assaut de la présidence des élèves, face à un pur produit stéréotypé, une blonde aseptisée, dont j’ai déjà évoqué les caractéristiques ci-dessus.
De cette histoire traditionnelle, battue et rebattue, le cinéaste fait tout à fait autre chose. Il faut d’ailleurs connaître les codes expliqués plus haut pour pleinement déguster ce qui nous est montré là. Car le héros, au nom improbable de « Napoléon Dynamite », porte bien son nom ; c’est à un véritable dynamitage du genre auquel nous assistons. En guise de famille, au lieu du standard véhiculé dans les films apparentés, avec mère et père aimant, petite soeur/petit frère propre sur elle/lui et un peu impertinent, l’auteur substitue une grand-mère casse-cou, habillée en homme, qui élève des lamas et part faire du quad à l’autre bout du monde, un oncle ringard très soucieux de son apparence, implants et abdos au rendez-vous, séducteur et roublard, se nourrissant uniquement de steacks et un frère inhibé qui ne rencontre des filles que sur internet.
Ajoutons à cela une atmosphère très années 70/80, costumes et musiques à l’appui, qui renforce encore le ridicule (assumé) et l’étrangeté de ce film, dans une esthétique semblable à ces séries américaines comme « Starsky et Hutch ».
Pour renforcer encore le côté décalé du film, le cinéaste use de procédés très bien venus, des plans statiques des personnages sur décor vintage, encore renforcés par un léger effet retard dans leur prise de parole, nous laissant tout le temps d’apprécier décor/costumes/esthétique globale.
De cet ensemble complètement barré se dégage un grain de folie absolument dévastateur qui nous conquiert, à base d’humour au 2e voire 3e degré. Et qui nous donne en même temps une idée intéressante de cette Amérique profonde peu souvent montrée au cinéma.
Faisons mention des acteurs (et de ceux cités dans les films de mon palmarès) qui prennent tous les risques dans cette société dominée par l’image : chapeau !
J’ai adoré.
FB
J’adore les 4 films que tu as cité. 🙂
Une liste à laquelle j’ajouterai : Capitaine Orgazmo (par les créateurs de South Park qui jouent également dedans). Et où,une fois n’est pas coutume, la VF est plus drôle que la VO.
Sans oublier Eh mec, elle est où ma caisse. (Comédie déjantée qu’à largement pompé Very Bad Trip en moins bien).