Cinéma – Pan NALIN : Kumbh Mela, sur les rives du fleuve sacré (2013)

Kumb mela

Le Kumbh Mela (ou « fête de la cruche ») est pour les hindouistes un moment très fort dans leur cycle religieux : tous les douze ans, a lieu la Purna Kumbh Mela, où selon la tradition, le nectar d’immortalité contenu dans une cruche originelle ressurgit en certains endroits. En 2013, l’événement avait lieu à Allahabad, au confluent de trois fleuves, le Gange, la Yamuna et la mythique Sarasvatî ; il a déplacé entre 50 et 100 millions de personnes, ayant entrepris ce voyage mystique pour se baigner dans le fleuve et en rapporter l’eau pour des ablutions. Durant 55 jours, sur presque 60 kms²,  ces millions de personnes venues de l’Inde entière, vivent entassées, se consacrant aux ablutions et à la prière. Tous les « sâdhus » (hommes détachés du monde et voués à Dieu) sont là, bien sûr.

Pan Nalin, à la demande de son père, a fait le voyage pour lui rapporter de l’eau du fleuve, lors de l’événement de 2013 et a décidé qu’il y aurait matière à documentaire. Nous voilà donc confrontés à sa vision d’ensemble du Kumbh Mela, ponctuée d’histoires individuelles de personnes qu’il a croisées là-bas : un sâdhu yogi qui a recueilli un nourrisson abandonné, quelques années auparavant, et l’élève, un jeune fugueur de dix ans plein de gouaille, un couple qui a perdu un petit garçon dans la foule (chaque année plus de 100 000 personnes se perdent dans ce dédale humain !), etc.

D’où vient l’ennui que nous éprouvons à regarder ce film… Hésitant entre très belles images de foule, de fleuve, d’individus, mais comme nous en avons déjà vu mille fois, et portraits pas vraiment intéressants de personnes qui le sont sûrement beaucoup plus, l’opus s’étire en longueur. L’auteur donne l’impression de ne rien avoir à raconter sur ce grand rassemblement mais également de ne pas savoir faire parler les autres. La vision de l’Inde qu’il nous transmet semble, et c’est un comble, obéir à des critères esthétisants tout à fait occidentaux. Quant aux entretiens, ils sont menés avec une naïveté désarmante, sans aucune profondeur, propos de type comptoir de bar. Le fond est atteint sur ce sujet lorsqu’il décrit les sâdhus que nous imaginons comme des hommes inactifs, fumant de la marijuana toute la journée et émettant des sentences philosophico-religieuses creuses et vaines. Ou alors s’essayant à des tours de force physiques (postures de yoga improbables et surtout, je recommande le lever de poids avec le sexe !) qui, décontextualisés, s’apparentent plutôt à des tours de foire qu’à des vecteurs de méditation. Quant aux badauds qui passent et demandent à un sâdhu de les bénir, ils ressemblent à ces bigotes superstitieuses des siècles passés accrochées à leurs médailles et reliques comme à autant de gri-gris. Quand nous savons toute la spiritualité de vie véhiculée par cette religion, nous en restons pantois…

Donc je vous recommande fortement d’éviter cet opus (allez plutôt voir « Maestro », voir critique plus bas !)

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