Littérature – Robert Louis STEVENSON (1850-1894) : L’île au trésor

Un classique. De ceux dont tout le monde connaît le titre et vaguement l’histoire, sans l’avoir lu ou il y a si longtemps. Je faisais partie de cette catégorie jusqu’à la semaine dernière, où j’ai vu sur les étagères de ma librairie préférée ce titre qui fleurait bon la littérature de nos grands-parents, plutôt recommandés aux garçons, car les pirates, les aventures et les bagarres, cela n’est pas fait pour les petites filles, qui, comme tout le monde le sait, préfèrent les contes de fées. A eux « L’appel de la forêt » (Jack London), « 20 000 lieues sous les mers » (Jules Verne), « Le lion » (Joseph Kessel). A elles « Blanche-Neige », « Cendrillon » et « La belle au bois dormant »…

C’est donc avec une certain plaisir de transgression que j’ai saisi ce livre… Et c’est lui qui ne m’a plus lâchée ensuite ! J’étais d’autant plus intriguée par lui que son auteur a également écrit ce chef d’oeuvre qu’est « Dr Jekyll et Mr Hyde ».

L’auteur, écossais, est un aventurier, original, qui délaisse successivement les carrières d’ingénieur et d’avocat pour parcourir le monde. De ces hommes à la stature hors du commun, à l’instar par exemple de Jack London, Winston Churchill ou George Orwell. Malgré une grave tuberculose qui se déclare tôt, il apparaît comme toujours en mouvement, plein d’énergie. Il passera les dernières années de sa vie installé dans une propriété qu’il a fait construire dans les Samoa avec sa femme.

« L’île au trésor », un de ses romans les plus connus, est écrit avant qu’il ne s’aventure dans le Nouveau Monde ou les mers du Sud, juste avec son imagination d’Européen.

Et c’est un livre parfait ! A déguster de page en page, comme je viens de le faire.  Une histoire limpide, le « la » étant donné par le titre, d’une chasse au trésor sur une île (que personne n’a réussi à identifier, mais fallait-il essayer ?), assez petite pour que les protagonistes puissent en faire le tour et assez étendue pour receler ce qu’il faut de forêts, marécages, plages, caps et baies propices aux rebondissements du récit.

Les pirates sont plus vrais que nature, « Chien noir »,  « Capitaine Billy Bones » « Long John Silver », nourris à la viande grasse de porc et au rhum, dont ils font une utilisation immodérée (c’est l’abus d’alcool qui tue Billy Bones au début du livre). Inquiétants à souhait, sans merci et sans peur du lendemain, ils traînent à leur suite tout un folklore plus vrai que nature, jambe de bois, chansons de marin, marque noire, prémonition de mort, couteaux rougis de sang, supplice de la planche…

Face à eux, des aventuriers novices, un seigneur, un docteur et Jim Hawkins, jeune garçon (dont l’âge est difficile à déterminer, mais que je situerai bien autour de quatorze/quinze ans), vont s’affronter à ces pirates, dont ils avaient fait dans un premier temps leur équipage, en toute ingénuité.

Jim Hawkins, le héros de l’histoire, est une sorte de sauveur maladroit et rusé à la fois. Malgré lui, dit-il, il prend des initiatives irréfléchies dont il ne mesure pas la portée sur le moment et qui vont contribuer à la survie des siens. Tête brûlée mais doué d’un sens impressionnant de l’à-propos, il se tire des situations les plus dangereuses. Un vrai héros, comme nous les aimons et qui donne un peu de légèreté à ce récit si âpre.

Car Stevenson sait animer devant nous un monde inquiétant fait de vengeances, traîtrises et mort. Plus d’un laisse sa vie dans cette quête éperdue de richesse. Jim fait la comptabilité morbide des pirates morts (plus que 9, et deux de moins…). En incise, je dirai qu’il paraît que ce livre a inspiré Agatha Christie pour « Dix petits nègres », même comptabilité, même décor insulaire.

Tout cela dans un style d’une grande beauté et très précis. Vous apprendrez, si vous ne le savez déjà, ce qu’est un bossoir, un galhauban, un ralingue, et tout cela sans effort !

Je ne suis pas sûre, par conséquent, que cette oeuvre soit intelligible à des enfants, mais je la recommande vivement aux adultes que vous êtes !

J’ai adoré…

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