Parmi les papous, il y a des papous papas et des papous pas papas. Il y a des papous papas à poux, des papous papas pas à poux, des papous pas papas à poux,…
Voilà d’où vient le titre de cette émission, celle qui m’a fait venir à l’écoute de la radio. Tous les dimanches entre 12h45 et 14h00 (« 13h58 » exactement), il ne fallait pas me déranger (maintenant que le « podcast » i.e. le téléchargement existe, je suis beaucoup plus libre de mes mouvements 😉 ). L’émission existe depuis 1984, je croise les doigts pour qu’elle survive aux multiples bouleversements de France Culture*.
Nous sommes, comme le titre (flanqué de mon sous-titre) l’indique, dans une émission de jeux littéraires. Jeu, parce que tout cela est ludique, enlevé, fort drôle (je vous met au défi de ne pas éclater de rire çà et là) et conduit par une petite bande de personnes cultivées qui ne se prennent pas au sérieux. Littéraire, parce qu’ils nous prennent au sérieux et tentent de nous instiller l’amour de la langue et des écrivains qui l’ont célébrée.
Issue en droite ligne du mouvement Oulipo (Ouvroir de littérature potentielle), fondé par des écrivains comme George Perec, Raymond Queneau, Jacques Roubaud et Italo Calvino, l’émission en reprend un des aspects les plus visibles, l’écriture sous contrainte.
Défilent devant nous de petites séquences, cinq à six par émission, rafraîchissantes et stimulantes.
Ainsi le DLA (diagnostic littéraire à l’aveugle), où l’un des comparses choisit un texte d’un auteur connu d’une page environ et le soumet à la sagacité des autres. Il faut deviner si l’écriture est masculine ou féminine, l’époque et finalement avancer des noms d’auteurs.
La séquence « Experts contre faussaires » est proche : il s’agit pour plusieurs « faussaires » de tenter la ré-écriture de la première et de la dernière phrase d’une oeuvre connue et pour deux « experts » de ré-attribuer les phrases aux bons auteurs.
« L’art de la périphrase » consiste, en partant d’une phrase simple, à la dénaturer par des périphrases successives, à partir de mots contenus dans la phrase. Le résultat, souvent étonnant, est soumis à un des participants pour qu’il tente de retrouver la phrase de départ.
Je ne m’attarderai pas sur les autres jeux, qui, avec ceux que j’ai décrits, se combinent chaque dimanche pour donner une émission unique.
La réussite de l’émission est due, au-delà de la forme, à ses magnifiques interprètes. Je rend tout d’abord un hommage (appuyé, comme l’on dit – ah ces formules toutes faites… Il y aurait un jeu littéraire à faire), à Bertrand Jérôme et Françoise Treussard. fondateurs de l’émission et également avant elle, de « Allegro ma non troppo » ou de « Mi fugue – Mi raisin » dans la même veine. Merci de nous amuser toutes les semaines avec tant d’élégance. Bertrand Jérôme nous a quitté, à ma grande peine, mais Françoise Treussard continue seule avec panache. Les invités sont à l’avenant, une bande de joyeux amis dont nous sentons la complicité. Talentueux, cultivés et cultivant l’humour, ils nous enchantent.
Vous aurez compris que j’adore cette émission et que je la recommande.
FB
*« Les décraqués », émission quotidienne, animé par les mêmes personnes, a disparu il y a quelques années. Bertrand Jérôme fondateur de l’émission, en a été évincé en 2004, deux ans avant sa mort, par Laure Adler. Plus généralement, nous constatons malheureusement à chaque modification de grille, une baisse de qualité de certaines émissions… Dommage.
Le site de l’émission : http://www.franceculture.fr/emission-des-papous-dans-la-tete
Et si vous voulez en savoir plus sur le mouvement Oulipo : http://www.oulipo.net/