Grâce à une de mes collègues chinoises, j’ai eu vent de cet endroit particulier, dont ceux d’entre vous qui ont suivi les jeux d’hiver 2022 ont déjà fait la connaissance. C’est ici que se sont déroulées par exemple les épreuves de saut à ski, de patinage de vitesse sur piste courte, de patinage artistique, de curling et de hockey sur glace.

A l’origine, c’est une aciérie fondée en 1919, la première et la plus grande de Chine employant des dizaines de milliers de travailleurs (j’ai lu le chiffre de 65 000, imaginez, l’équivalent de la ville de Bourges) et s’étendant sur plus de 200 hectares. Elle a été fermée en 2011 puis réaménagée pour accueillir les jeux olympiques. Il est prévu à l’avenir que le site accueille des immeubles de bureaux, voire un musée et autres installations « durables », miracle d’une reconversion ou effet d’annonce ? A suivre.
Aller à la découverte de ce site en plein été m’a paru à contrecourant, comme un hommage inversé aux athlètes qui ont eu si froid là-bas, alors que ce que je risquais était une insolation avec les 34/35°C qui m’attendaient. C’est à 25 kms de chez moi, donc j’ai pris le métro, d’abord une ligne normale et puis une nouvelle ligne mise en service à l’occasion des jeux, flambant neuve et vide (c’est un peu la tendance actuellement dans la capitale sur toutes les lignes).

A la sortie du métro, je me retrouve enfermée dans un dédale de palissades, ne sachant pas trop où aller, avec d’immenses ciels bien indifférents à mon dilemme qui m’entourent, sans me donner beaucoup d’indices.


Je marche, je marche dans le temps lourd, m’aidant de plusieurs applications de localisation. Ce qui me permet d’aller à la rencontre de ce pont improbable (新首钢桥).

Moi qui ai bien fait les choses, réserver mon entrée, vérifier que j’ai un test PCR de moins de 48 heures, je me rend compte que tout cela est bien inutile, il est possible de pénétrer le site sans aucun contrôle, mystère des procédures ici…

Comment vous dire mon plaisir à pénétrer ce site qui mélange la nature avec tous ces objets industriels laissés en héritage par l’aciérie, avec parfois une touche d’historicité moderne. L’immensité du ciel bleu ponctué de nuages est ici un allié, pour leur faire un contrepoint qui les met en valeur. Plane ici comme un air d’éternité immobile.




Et puis la voilà, la piste de saut, dénudée par le beau temps, on dirait une construction d’un parc Disney égarée au mauvais endroit. Du haut de ses 60 mètres, elle domine les alentours comme une vigie arc-en-ciel.

De même que les gradins esseulés, un peu hors contexte dans tout ce temps d’été.


Me heurtant à un labyrinthe de barrières (décidément, barrières après palissades, je suis dans un environnement bien protégé), je suis encore en train de m’interroger sur la manière d’accéder au reste des installations, quand j’avise plusieurs autochtones qui semblent déambuler sans problème ; et bien sûr je les suis. Bien m’en a pris car je vais pouvoir arpenter tout cet espace sans plus d’entrave.
Et là, au détour d’un passage, je découvre l’essence de cet endroit, qui adosse des architectures néo-anciennes aux vestiges de l’usine, le long d’un lac tranquille. Il faut bien des arbres et des roseaux pour adoucir un peu ces formes massives et brutes.


Les voilà enfin, ces aéroréfrigérants qui ont fait le tour des médias mondiaux, comme l’emblème de ces jeux olympiques controversés. C’est quand même un coup de maître d’avoir intégré l’histoire industrielle à cette compétition, car l’industrie est un des fondements de la Chine.

Chemin faisant, suivant encore les autochtones, je croise ces deux petites princesses sur leurs vélos assortis (avec masque, nous sommes quand même dans une sévère attaque de pandémie, avec 1000 cas pour 21 millions d’habitants, il ne faut pas rigoler !)
Défiant la menace de la maladie ou, plus probable, d’un confinement, bien des locaux avaient décidé de venir pique-niquer ici, sous des tentes pour se protéger du soleil. Quel beau symbole de résistance à toutes ces mesures qui nous contraignent !
Suivant le mouvement, j’ai emprunté une rampe qui me permettait d’accéder à une vue en hauteur du site. Impossible de rater les photos ici. Presque trop facile.







C’est un mélange étrange et réussi. Arpenter cette passerelle suspendue permet d’avoir une vision d’ensemble sur cet endroit un peu dépareillé et irrésistible à la fois. Nous étions gâtés par les ciels changeants et tous aussi magnifiques les uns que les autres, qui versaient comme un souffle de beauté absolue sur ces constructions terrestres.

J’ai ensuite commencé un périple dans le reste des « quartiers » à pied et j’ai vite renoncé devant l’immensité (216 hectares) qui m’attendait. J’ai pris un vélo partagé et cela a été un vrai régal, il n’y avait personne et des pistes cyclables à perte de vue.

Je suis partie nez au vent à la rencontre de ces structures métalliques imposantes, qui dressaient leur fierté passée contre le bleu du ciel. Parfois des roses faisaient une petite attention de beauté à leur rudesse. Et les arbres cherchaient vainement à les égaler, se dressant de toute la hauteur de leur feuillage.










J’ai assisté ici à une première, un rassemblement de motos. Je ne veux pas parler des scooters électriques qui filent à toute vitesse comme des guêpes silencieuses dans les rues du centre, non, je parle de ces motos qui font vroum vroum, des engins avec au moins une cylindrée de 250cc. C’était la première fois que j’en voyais autant, ce qui est finalement normal, ce sont des routières. Filles et garçons paressaient, un café ou un coca à la main à côté de leurs fières machines (bière ? N’y pensez même pas, ce n’est pas le genre ici).


Et pour terminer cette belle balade avec vous, d’autres véhicules étranges. D’abord ces petits robots, dont je n’ai pas bien compris à quoi ils servaient, esseulés qu’ils étaient sur le bord de la route.


Et puis ces taxis sans chauffeur, vrais témoins de l’innovation technique en Chine.

Je suis repartie vers le centre avec toutes ces belles images en tête, comme un parfum de liberté.
FB