Vous aurez droit ici à un article plutôt court, car je laisserai les images parler d’elles-mêmes. Nous sommes à une époque où, si j’ai bien suivi, les femmes luttent pour une égalité de traitement et où nous avons fait de grands progrès sur le sujet, globalement dans le monde occidental (1). Rappelez-vous tous les mouvements en faveur du vote des femmes (les suffragettes du début du XXe siècle), les combats pour obtenir l’égalité salariale, les lois prises dans divers pays pour punir le viol, le harcèlement sexuel, pour que la femme passe du statut d’objet sexuel dominé à celui d’être humain indépendant, éduqué, libre de ses choix. Sans bannir sa féminité, qui est intrinsèque, la femme réclame un traitement égalitaire dans tous les champs de la vie sociale, vie citoyenne, vie professionnelle, vie privée. Les féministes, avec tous les excès que l’on pourrait certes leur reprocher (mais il faut parfois de l’outrance pour obtenir la prise de conscience), ont oeuvré depuis des décennies dans ce sens.
Et pourtant, et pourtant… Nous voyons fleurir tout un panthéon de chanteuses qui ne cessent de réduire la femme à un objet sexuel, à l’existence centrée sur la mode (« Love Cavalli, dipped in Versace […] Real Louis bags and breathe Gucci », Rihanna « Bad girl ») et sur le sexe avec tous ses fantasmes (Pick a part, you dream it up. Librarian, dominatrix. Oh boy, tell me your fantasy,Tonight’s the night, Katy Perry Dressin’up) (2). Ne nous y trompons pas, nous sommes ici face à l’élite mondiale, à ces personnalités que tout le monde suit, pour savoir ce qu’elles portent, qui elles aiment, ce qu’elles disent (elles sont d’ailleurs sur tous les réseaux sociaux qui se respectent et twittent à longueur de journée). Elles font les tendances, omniprésentes dans les magazines féminins et dans notre monde qui ne vit plus que de cela, elles sont sur le podium, comme number one, car elles réunissent les trois critères auxquels aspire notre société, beauté, richesse et succès.
Mais où est passé la prime au savoir et à l’intelligence, me direz-vous ? Et bien, n’étant plus à la mode, elle ne rapporte plus et, dans ce monde où domine l’argent, elle se trouve reléguée dans des réserves préhistoriques (en France, par exemple, la radio France Culture avec son audience rétrécie de jour en jour, en Europe, via les Prix Nobel, dont la majorité de la population ne se soucie que comme d’un iota, dans le monde au travers des journaux dits spécialisés alors qu’ils devraient être généralistes ou de blogs relativement confidentiels au regard d’un grand nombre qui n’ont rien à dire). Mais arrêtons-là le débat, ceci est une autre histoire…
Au regard des différentes luttes féministes dont j’ai parlé ci-dessus, force est de constater qu’elles ont lieu dans une dimension rétrécie, puisque les femmes qui font le plus d’audience dans notre monde font tout pour réhabiliter l’objet sexuel qui sommeille en chacune d’entre elles et nous incitent à faire de même. Les voix différentes ne sont plus entendues, n’ayant pas les bonnes caractéristiques (beauté et richesse et succès), elles sombrent dans une audience confidentielle. Mais voyons les chose d’un autre point de vue (du bon côté ?), finalement, nous constatons que les images projetées par ces femmes, et soulignées par les paroles de leurs chansons, convergent avec l’image de la femme idéale issue de clips super-machos comme ceux des rappeurs actuels. Donc tout va bien, le Roméo du XXIe siècle rencontrera bien sa Juliette…
Dans notre société, nous pouvons juste constater que la sexualité reste au premier plan. Ce que nous déplorons en termes de conditions de la femme dans des pays oppressifs (les pays arabes fondamentalistes, qui ont mis en place tout un corpus de mesures pour empêcher la femme d’être trop en lumière par rapport au désir masculin), trouve un écho inversé ici où, la femme libérée des carcans ancestraux, n’a de cesse que de se retrouver sous la coupe de l’homme en excitant son désir. Cela va t-il faire progresser la condition de la femme à long terme ? J’ai quelques doutes…
Et comme promis je laisse les images parler…
Les chanteuses peu vêtues
Avec une connexion étrange au désir des hommes qui affirment leur masculinité (extraits de clips de rap)
Et pour finir, quelques couvertures du magazine « Lui », dédié aux hommes, pour une mise en perspective (non) réjouissante
FB
Et en excipit, une chanson de Zazie, que j’apprécie beaucoup et qui dit bien tout cela
(1) Je limite ici mon propos aux pays européens et à l’Amérique du Nord.
(2) Je précise que j’ai pris deux chansons au hasard et que « bingo ! » pour illustrer mon propos, preuve que nous sommes dans l’illustration du dicton « je donne un coup de pied dans l’arbre et il en tombe des centaines » 😉