Encore un endroit que je ne connaissais pas, pourtant plus mis en exergue que le Château de Monte- Cristo, où je me suis aventurée la semaine dernière. Il est vrai qu’avant d’expérimenter les longues balades, parfois bien lointaines qui m’ont permis de mieux connaître la capitale chinoise (où j’ai été expatriées quatre années), je n’avais pas cette audace ni cette ouverture pour repousser les limites du périphérique parisien.
Car il faut ici aussi emprunter un RER au long cours, puis marcher longtemps dans une zone pavillonnaire bien accueillante pour atteindre cet endroit merveilleux. Il faisait très beau, le soleil nous caressait de toute son ardeur, dans un ciel cobalt presque immaculé.
Presque personne ici, un ressenti de privilégié, à hanter ces lieux dans une presque solitude, pour découvrir ce bel édifice du XVIIe siècle, acquis par Joséphine de Beauharnais, épouse Bonaparte, en 1799.
Joséphine de Beauharnais, Marie Josèphe Rose Tascher de la Pagerie de son vrai nom (1763-1814), a vécu plusieurs vies dans son existence. Née en Martinique, d’une famille propriétaire d’une grande plantation, avec comme père Joseph Gaspard Tascher de la Pagerie et comme mère Rose Claire des Vergers de Sannois (ne vous méprenez pas, je n’essaye pas de faire acte de pédanterie, simplement je trouve ces noms si poétiques !). Elle se marie à 16 ans à Paris avec le Vicomte Alexandre de Beauharnais, mariage arrangé par leurs familles, auquel elle mettra fin en 1785 avant de repartir en Martinique. Revenue en France pour fuir la Révolution Française, elle va survivre en se remettant en couple avec Alexandre, jusqu’à l’emprisonnement et à l’exécution de ce dernier sous la Terreur en 1794. En difficile position, elle parvient cependant à faire son chemin dans la société et rencontre l’officier Napoléon Bonaparte auquel elle se marie en 1796. S’ensuivra son ascension vers la gloire, devenant Impératrice des Français en 1804 et Reine d’Italie en 1805. Jusqu’à son divorce de l’Empereur en 1809, suivie quelques années après par sa mort en 1814 dans ce château dont elle avait fait son lieu de vie. Une femme battante à plusieurs vies, en sorte.
Ce château, où elle a vécu avec Napoléon, elle l’a fait sien en convoquant les meilleurs architectes pour remodeler le lieu selon les canons esthétique du Premier Empire. Après sa mort, le château légué à son fils Eugène de Beauharnais est vendu par sa veuve en 1828, puis racheté par Napoléon III, petit-fils de Joséphine, qui par amour pour sa grand-mère, va s’atteler à restaurer le lieu, faisant remeubler les pièces avec du mobilier utilisé par elle ou son Empereur de mari. Et c’est une merveille.
Dès que nous pénétrons dans le lieu, le hall donne le la. Marbre et statues issues de l’Antique dessinent un vestibule romain.
Le château possède une collection de peintures magnifique centrées sur l’Empereur, sa femme et leur famille. Je vous livre ici cette très belle toile, iconique (je dis cela parce que je l’ai vu dans mes livres d’histoire au lycée, peut-être vous aussi).
Déjà saisie par la beauté du vestibule, je suis allée d’émerveillement en émerveillement devant le raffinement du lieu, où je n’ai jamais vu autant de meubles « Empire », façonnés par les meilleurs ébénistes du moment, dont les Frères Jacob.
L’impératrice aimait la peinture et s’est fait une galerie personnelle, dont un exemple plus bas.
Nous sommes comme dans un musée du Premier Empire, qui nous montre toutes les variations du style, s’appuyant sur l’Antiquité (très à la mode avec les fouilles de Pompéi et autres sites dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle), en vraie rupture avec les tendances des époques précédentes.
Napoléon s’étant installé à Malmaison, certaines pièces ont été spécialement aménagées pour lui, comme cette salle du conseil, revêtue de panneaux à l’inspiration romaine et aux murs façonnés en forme de tente (rappelant sans doute les grands généraux itinérants du monde antique, tel Alexandre le Grand).
A l’extrémité du rez-de-chaussée se trouve le bureau de l’Empereur, aux plafonds décorés dans le style de Pompéi, pendant que les murs s’ornent de belles bibliothèques de bois rehaussées de miroirs. L’Empereur y avait faire un escalier dérobé qui lui permettait de passer directement à l’étage supérieur, celui des appartements privés dont nous allons avoir un aperçu bientôt (cela fait très guide des monuments de France, non ? 😉).
A l’étage supérieur se trouve la chambre de l’Empereur, toujours en forme de tente pour rappeler qu’il est avant tout un chef de guerre, toujours en mouvement sur le terrain. Les meubles raffinés sont tout en réminiscence d’Egypte. M’est venu à l’esprit que la couleur jaune était celle des empereurs en Chine ; mais je ne sais pas s’il y a un rapport quelconque ici.
La chambre de l’Impératrice est elle aussi magnifique, avec ce lit somptueux adossé à des cygnes. Ce fut également son lit de mort, une émotion nous saisit devant ce lieu chargé d’histoire.
Après cette visite, qui nous a fait pénétrer au cœur de l’intimité d’une femme et d’un homme hors du commun, il ne faut pas manquer la visite du dernier étage, qui nous emmène dans les lieux d’exil de Napoléon, à l’Ile d’Elbe puis à Sainte-Hélène. Les objets présentés (dont le masque mortuaire de l’Empereur), les témoignages de ses proches le rendent très humain, nous voyons ici la fin de vie d’un homme, tout simplement.
Très belle aventure en lisière de la capitale.
FB












