Cinéma – Isabel COIXET : Un amor (2023)

Natalia, une jeune femme espagnole, vient s’installer dans un hameau de la province de La Rioja, pour fuir sa vie (que nous imaginons citadine) dont elle ne supporte plus la pression ni le stress. Elle va faire la connaissance de ses voisins, avec lesquels elle va nouer des relations d’amitié. Avec l’un d’entre eux, cela va même aller beaucoup plus loin.

Nous retrouvons le talent d’Isabel Coixet dans la manière de filmer les lieux, les montagnes et paysages en premier lieu, qui font comme un écrin à la fois désolé et grandiose à l’intrigue. Mais aussi les intérieurs, nus et laids. L’héroïne s’est établie dans une maison en presque ruines, qu’elle loue malgré tout son inconfort et la rudesse du propriétaire, grossier personnage qui ne veut rien entendre. Tout cela installe au départ une atmosphère étrange et singulière qui nous intrigue.

La réalisatrice excelle également à dépeindre les seconds rôles, qu’elle fait exister devant nos yeux en quelques scènes. Il y a Piter, vitrailliste, homme des bois raffiné et séduisant, Lara et Carlos, un couple qui vient passer le week-end à la campagne pour se ressourcer avec leurs deux filles et l’Allemand, un géant un peu mutique, qui cultive des légumes.

Sans parler de sa manière de filmer l’héroïne, campée par Laia Costa, magnifique actrice.

Et pourtant, et pourtant… J’ai trouvé ce film dérangeant, voulant tellement nous prendre à revers que cela ne fonctionne pas. C’est une héroïne masochiste que nous avons là ; de même qu’elle a choisi une maison dévastée, elle va jeter son dévolu sur un homme qui ne fait que la martyriser. Car la réalisatrice échoue à donner une épaisseur à ce personnage masculin, qui, au lieu d’être énigmatique dans sa rudesse, se révèle creux et caricatural, au point que, faute d’empathie, nous nous désintéressons de cette pseudo histoire d’amour.

Il y a aussi ces mille pistes lancées qui ne débouchent nulle part, rien n’est fouillé, tout devient plat (l’histoire du chien par exemple).

Il faut dire que j’avais en tête le magnifique « The secret life of words » qu’elle avait réalisé en 2005 et qui compte dans mon palmarès de films préférés. J’ai vu ici une pâle décalque, où nous croisons les mêmes thèmes, une héroïne tourmentée qui se réfugie dans une communauté fermée sur elle-même (plate-forme pétrolière vs hameau) et rencontre un homme lui aussi tourmenté (Tim Robbins vs Hovik Keuchkerian), sur fond de désastre humanitaire (Guerre de Yougoslavie vs combats en Afrique). Et la comparaison est en défaveur de ce film-ci, clairement.

Je pense que je vais aller faire un tour à nouveau sur cette plate-forme du bout du monde…

FB