Chine – Pékin, Montagne Yaji 丫髻山 (2022)

Dans cette période intermédiaire entre l’hiver et le printemps (qui ne durera pas longtemps, les transitions ici sont brusques), je préfère attendre pour aller voir les floraisons dans les beaux jardins de Pékin, qui commencent plutôt fin mars. J’ai donc choisi pour ce dimanche de début de mois de m’éloigner du centre (tout en restant dans la capitale, pour éviter tests PCR et autres joyeusetés), et de rendre visite à un temple situé en haut de la montagne Yaji. 丫髻山, le nom se rapporte à une coiffure de femme avec deux chignons bombés, qui renvoient à la montagne ornée de ce beau temple.

On imagine bien l’analogie avec la coiffure à deux chignons, non ?

Un trajet d’une heure et demie pour atteindre les lieux, en traversant toujours cette nature sèche, si sèche, dont nous ne comprenons pas comment elle arrive à survivre sans eau.

J’ai choisi cette fois une agence de voyage fréquentées par des anglophones, les personnes qui sont avec moi dans le minibus me sont inconnues. Notre guide, Robin pour son nom occidental, nous dit que l’excursion jusqu’au sommet va être facile. En première approche, à la vue du site, j’ai des doutes sur le fait que nous ayons la même acception de la notion de facilité avec les Chinois !

Et là, vous ne voyez que la moitié de la montée

Qu’importe, la température est douce mais assez fraîche pour nous accompagner dans cet exercice physique, le temps est au beau, la promenade promet d’être magnifique.

Avant de partir, lanternes sur fond de montagne
Après 200 marches

Je redécouvre le plaisir de l’effort, un pas après l’autre. Bien sûr, il ne faut pas être orgueilleux et laisser passer les petits cabris de 10 ans et plus qui dansent sur les marches pendant que vous êtes en train de chercher votre respiration. Mais nous arriverons tous au même endroit, non ? Certains plus vite que d’autres, je vous l’accorde !

Et tout est tellement beau en chemin.

Arrivée au temple Dongyue

La première étape, après une vraie ascension, est pour le temple Dongyue 东岳庙, un temple bouddhiste dédié à un empereur mythologique, le Grand Empereur du Pic de l’Est, chargé par l’Empereur de Jade de s’occuper des êtres vivants (hommes et animaux). Pour replacer en contexte, l’Empereur de Jade 玉皇大帝 est le Dieu des Dieux taoïste, un peu comme Jupiter dans la mythologie romaine. Inutile de dire que c’est ici une célébrité.

Les généraux de l’Empereur
Le modeste coin du nettoyage du temple, en couleur caméléon
Nous retrouvons ces structures connues des temples taoïstes, si belles
Avec au loin cette montagne presque surnaturelle dans sa sécheresse
Et le sanctuaire principal qui semble presque nous narguer, nous en bas…
On dirait presque le Christ, dans le cadre bleu, ne m’en demandez pas davantage

Chemin faisant, je croise une (mini) forêt de stèles, bien immuable, comme en éternité.

Je vais ici raconter une anecdote qui en dit beaucoup sur les Chinois, je pense. Arrivée au premier niveau du temple, j’ai croisé un père et sa fille, des Chinois, qui étaient avec nous dans le bus. La petite fille, 7 ans, avait envie de continuer à grimper et m’a emboîté le pas. Me voilà nantie d’une gamine délurée et bien mignonne, ne parlant que chinois, qui refusait d’attendre son père et m’encourageait à chaque volée de marches 加油 (jiayou : courage), jusqu’à ce que j’envoie un message sur le chat du groupe pour signaler que j’étais avec elle. Son père m’a remercié, il l’avait perdue. Et chemin faisant, nous avons croisé un couple de jeunes gens qui lui ont demandé ce qu’elle faisait avec moi (et oui, comment expliquer qu’une enfant chinoise chemine avec une femme française qui pourrait être sa mère/grand-mère ?). Elle a répondu que j’étais son Ayi 阿姨, le titre donné ici aux femmes plus âgées, en signe de respect. Ce qui a bien fait rire ce couple ! Quand je les ai croisés à nouveau dans la descente, ils m’ont fait un signe amical et un grand sourire… La gentillesse ici est parfois étonnante…

Revenons à notre ascension. Après bien des pas à l’assaut de ces marches infinies, en croisant au passage des points de vue incroyables, j’ai fini par arriver au but.

Point de vue intermédiaire
Sanctuaire d’étape
Et celle-là, c’est juste pour l’esthétique !

Et le voilà, ce sanctuaire composite perché sur sa montagne, comme un nid d’aigle suspendu loin du monde.

Arbres votifs
Nous arrivons, l’escalier se fait plus majestueux

Et là, je me retrouve le souffle coupé, non par la lente montée mais par la beauté du lieu, ces temples improbables accrochés au flanc de la pierre, qui se font sentinelles sur le monde alentour.

Comme un abri créé par la pierre brute
Au loin, bien loin, le coeur de la ville dont je viens

Bien sûr, cela demande des efforts, j’ai quand même monté quelques 1200 marches et en ai descendu autant (puisque le chemin de retour était le même qu’à l’aller 🙂 ).

Mais cela m’a permis de saisir comme un moment d’éternité, un apaisement à voir ces paysages impressionnants qui m’entouraient, dans le silence des hauteurs.

Et pour me réconforter, j’ai mangé ensuite avec grand plaisir de belles fraises sucrées, qui sont la spécialité du lieu. Excellentes !

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